Le président égyptien Sissi doit prendre dimanche la tête de l’Union africaine. Il succède à son homologue rwandais Paul Kagame, qui achève ainsi une année particulièrement active à la tête de l’organisation.
Le président rwandais Paul Kagame, qui a multiplié les initiatives durant son année à la tête de l’Union africaine (UA), doit passer le témoin dimanche 10 février à l’Égypte, poids lourd régional en quête d’influence sur le continent, lors d’un sommet de l’organisation à Addis Abeba.
Le chef de l’État égyptien Abdel Fattah al-Sissi prendra officiellement la présidence tournante de l’UA lors de la cérémonie d’ouverture du sommet, prévu pour durer deux jours, au menu duquel figurent la poursuite des réformes institutionnelles de cette organisation comptant 55 membres, l’établissement de la Zone de libre-échange continentale (Zlec) et les crises traversant le continent.
Après une présidence extrêmement active, marquée toutefois par un camouflet de taille après les élections en RD Congo, Paul Kagame a tiré sa révérence avec une énième initiative samedi, cette fois en vue d’améliorer les soins de santé en Afrique.
Son successeur s’est, lui, d’ores et déjà engagé à poursuivre certains efforts déployés par son prédécesseur, à commencer par la Zlec, un des projets clés de l’UA pour renforcer l’intégration du continent.
Kagame était parvenu en mars 2018 à obtenir la signature de 44 pays sur l’accord d’établissement de la Zlec, mais cet essai marqué par le président rwandais doit maintenant être transformé par son homologue égyptien : 19 pays ont à ce jour ratifié l’accord, alors que 22 ratifications sont nécessaires pour qu’il entre en vigueur.
L’Égypte « souhaite renforcer sa position sur le continent africain et ne pas être considéré comme un pays tourné uniquement vers le monde arabe », souligne Liesl Louw-Vaudran, de l’Institut pour les études sur la sécurité (ISS).
Maintien de la paix
Sissi devrait cependant se démarquer de son prédécesseur en axant sa présidence sur la sécurité, le maintien de la paix, et la reconstruction post-conflit, des questions étroitement liées au thème de l’UA choisi pour 2019, année des « réfugiés, rapatriés et personnes déplacées ».
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, présent à Addis Abeba, a salué samedi un « vent d’espoir » qui souffle selon lui sur l’Afrique, après une série d’élections pacifiques (RD Congo, Madagascar, Mali), d’accords de paix (Soudan du Sud, Centrafrique) et de réconciliations (Éthiopie-Érythrée).
Les observateurs n’attendent toutefois pas de Sissi un mandat aussi actif que celui de Kagame, les grandes puissances étant généralement réticentes à une UA trop forte ou trop intrusive.
Surtout, note un diplomate africain, que l’Égypte n’a jamais oublié sa suspension de l’UA en 2013, décidée après la destitution par l’armée de l’islamiste Mohamed Morsi, premier président démocratiquement élu en 2012.
Désaveu
Paul Kagame avait essuyé un cinglant désaveu après avoir demandé au nom de l’UA la suspension de la proclamation des résultats de la présidentielle de décembre en RD Congo, entachés selon lui de « doutes sérieux » : les résultats avaient finalement été validés par la Cour constitutionnelle congolaise et salués par les poids lourds du continent, dont l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Égypte.
« L’UA et sa Commission n’ont que la puissance que les pays membres veulent bien leur donner », analyse Elissa Jobson, de l’International Crisis Group. « Contrairement à l’Union européenne, les États africains n’ont pas transféré de souveraineté à l’Union africaine. »
Amnesty International a pour sa part exprimé ses craintes quant à l’impact de la présidence de Sissi sur les mécanismes d’évaluation des droits humains en Afrique, accusant l’Égypte d’avoir mené ces dernières années des attaques politiques haineuses contre la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples.
Avec AFP