L’ex patron du perchoir Ivoirien poussé à l’exil forcé par le président Alassane Ouattara a pris la décision de mettre à son long périple exil en Europe et Asie. Le leader du parti Générations et peuples solidaires (GPS) l’a annoncé au Niger à l’occasion de sa rencontre avec le chef de la junte.
L’ancien chef rebelle et ex-Premier ministre, sous le coup d’une condamnation à perpétuité, a créé la surprise en annonçant la fin de son exil de près de cinq ans.
La nouvelle fait l’effet d’une bombe : l’ancien chef rebelle et ex-Premier ministre ivoirien Guillaume Soro est bien décidé à rentrer de son exil de près de cinq ans du continent. C’est ce qu’il a annoncé dimanche 12 novembre dans une courte vidéo postée sur X (ex-Twitter), sans toutefois préciser dans cette déclaration officielle, s’il comptait rejoindre la Côte d’Ivoire, où il est sous le coup d’une condamnation à perpétuité.
La réponse est tombée quelques heures plus tard dans la matinée de ce lundi 13 novembre, où Guillaume Soro a annoncé se trouver à Niamey depuis samedi. L’ancien protégé du président Ouattara, âgé de 51 ans, y a rencontré à Niamey, la capitale du Niger, le général Abdourahamane Tchiani arrivé au pouvoir par un coup d’État en juillet. « J’ai eu l’honneur d’être reçu ce jour en audience par le président de la transition du Niger, chef de l’État, le général Abdourahamane Tchiani, accompagné du général Salifou Mody, ministre de la Défense, et du général Mohamed Toumba, ministre de l’Intérieur », a déclaré Guillaume Soro sur son compte X. « L’entretien qui a duré une heure et demie a été exceptionnel par la qualité et la profondeur des échanges », a-t-il poursuivi.
Le récit de cinq années d’exil
Dans sa déclaration de dimanche soir, Guillaume Soro, en costume cravate et barbe grisonnante, affirmait mettre fin à son « exil » qui l’avait conduit ces dernières années en France, en Belgique et à Dubai notamment, indiquant qu’il lui était « pénible de vivre loin » de sa « terre ancestrale et natale d’Afrique ». Il a également affirmé qu’on a « tenté de (l’)arrêter » à l’aéroport d’Istanbul le 3 novembre afin de l’extrader en Côte d’Ivoire mais assure se porter « très bien ».
Il a également détaillé s’être rendu successivement en France, en Belgique, à Dubai et « jusqu’aux confins du continent asiatique » ces dernières années, accusant le président ivoirien Alassane Ouattara d’avoir « entrepris de déclencher une féroce chasse internationale à l’homme », à son encontre. « Je n’irai pas plus loin dans mon exil, je refuse d’être fugitif. Je ne suis coupable d’aucun forfait », a-t-il poursuivi, affirmant vouloir « contribuer à la réconciliation des fils et des filles » de la Côte d’Ivoire.
Un retour surprise à Niamey
Pour son retour sur le continent africain, il a donc choisi le Niger, pays qui entretient des relations tendues avec la Côte d’Ivoire depuis le coup d’État du 26 juillet qui a porté le général Tchiani au pouvoir et renversé Mohamed Bazoum.
Dans les semaines qui ont suivi le putsch, le président ivoirien Alassane Ouattara faisait partie des voix ouest-africaines les plus déterminées en faveur de sanctions économiques et d’une intervention militaire pour rétablir dans ses fonctions le président renversé Mohamed Bazoum. Le président Ouattara, qui a assisté à un sommet Arabie saoudite-Afrique à Riyad, y avait rencontré vendredi le Premier ministre nigérien nommé par les militaires, Ali Mahamane Lamine Zeine.
Contacté par l’AFP, le porte-parole du gouvernement ivoirien Amadou Coulibaly n’a pas souhaité faire de commentaire sur la réunion entre MM. Soro et Tchiani.
« Il y a une sorte de nouvelle configuration géopolitique dans la sous-région avec trois juntes (Burkina, Mali, Niger) qui voient Abidjan comme un adversaire. Guillaume Soro se rapproche géographiquement de la Côte d’Ivoire et pourra manœuvrer dans ces pays en relative sécurité », estime l’analyste politique ivoirien Arthur Banga.
Chef de la rébellion qui contrôlait la moitié nord du pays dans les années 2000, Guillaume Soro avait aidé militairement Alassane Ouattara à accéder au pouvoir lors de la crise post-électorale de 2010-2011 face au président sortant Laurent Gbagbo, qui refusait d’admettre sa défaite. Il était alors devenu le premier chef du gouvernement du président Ouattara, puis président de l’Assemblée nationale en 2012, avant une rupture début 2019 en raison, selon plusieurs observateurs, des ambitions présidentielles de Guillaume Soro. Il a été condamné en 2020 en son absence à 20 ans de prison pour « recel de détournement de deniers publics » en Côte d’Ivoire, puis à perpétuité un an plus tard pour « atteinte à la sûreté de l’État », accusé d’avoir fomenté une « insurrection civile et militaire » visant à renverser le régime de Ouattara en 2019. Son appel avait été jugé irrecevable. Guillaume Soro était déjà sorti du silence en mai dernier, affirmant qu’aucune raison ne l’empêchait d’être candidat à la prochaine élection présidentielle, prévue en 2025 en Côte d’Ivoire. Son mouvement politique, Générations et peuples solidaires (GPS) a été dissous en Côte d’Ivoire en juin 2021.
Avec Le Point Afrique