Furieux, le président américain Donald Trump a assuré lundi que le Congrès n’était « pas en mesure » de le destituer, une hypothèse avancée par certains élus démocrates se fondant sur le rapport d’enquête sur l’ingérence russe dans la présidentielle de 2016.
« Seuls de graves délits ou infractions peuvent aboutir à une destitution », a affirmé Donald Trump sur Twitter.
« Je n’ai commis aucun délit (pas de collusion, pas d’obstruction) donc vous n’êtes pas en mesure de me destituer ».
Après 22 mois d’enquête, le procureur spécial Robert Mueller a conclu qu’il n’y avait pas eu d’entente entre l’équipe du républicain et Moscou, dans son rapport publié jeudi.
Mais, si M. Trump crie depuis victoire, s’estimant totalement exonéré, ces conclusions ne l’ont pas blanchi des soupçons d’entrave à la justice.
Mueller a ainsi montré que Donald Trump avait essayé de torpiller son enquête, en voulant notamment le limoger.
Se saisissant de ce point, les démocrates affirment qu’avec son rapport long de plus de 440 pages et basé sur les témoignages de quelque 500 personnes, le discret procureur spécial leur a en fait laissé une feuille de route afin qu’ils poursuivent l’enquête au Congrès.
Le rapport Mueller stipule que « le Congrès a le pouvoir d’interdire l’emploi corrompu par un président de son autorité afin de protéger l’exercice de la justice », a souligné la puissante présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, dans une lettre à ses troupes, avant de promettre:
« Le Congrès ne restera pas silencieux»
Elle s’entretiendra à ce sujet par téléphone ce lundi avec les élus démocrates de la chambre basse.
L’appel, prévu en fin d’après-midi, promet d’être agité tant les avis diffèrent sur la marche à suivre, avec en perspective l’option explosive d’une procédure de destitution, ou « impeachment ».
Plusieurs élus de l’aile la plus à gauche du parti y sont favorables, dont la sénatrice Elizabeth Warren, candidate à la Maison Blanche.
Mais elle reste à ce jour l’une des rares voix de premier plan à appeler à cette procédure.
– « Guerre totale » contre Trump –
Les autres candidats démocrates à la présidentielle évitent le sujet, certains expliquant vouloir d’abord entendre Robert Mueller, qui a été appelé à témoigner à la chambre basse en mai. Il n’a pas encore donné suite.
Les chefs démocrates au Congrès, Nancy Pelosi en tête, sont eux circonspects face à une procédure qui risque grandement d’échouer, puisqu’elle prend la forme d’un procès devant le corps législatif. Or le Sénat américain a conservé sa majorité républicaine et reste farouchement fidèle à M. Trump, même après le rapport.
Seul un sénateur de son parti, Mitt Romney, critique régulier du président, s’est dit « écoeuré » par les faits attribués au président et à son équipe de campagne. Mais… il a du même coup appelé à « aller de l’avant ».
Il serait dangereux pour les démocrates de se concentrer sur une procédure de destitution au détriment des sujets qui préoccupent grandement les électeurs, comme la santé, à l’approche de la présidentielle de novembre 2020, estiment plusieurs chefs. Les Américains pourront rendre leur verdict dans les urnes, proclament-ils.
Mais il serait difficile de tourner la page comme si de rien n’était, rétorquent d’autres voix.
« Peut-être que nous irons jusque-là, peut-être pas », a déclaré dimanche le président de la commission judiciaire, qui serait chargée de lancer les hostilités, Jerry Nadler, sur NBC. Mais d’abord, il faut « évaluer toutes les preuves ».
L’opposition n’a en tout cas pas attendu les conclusions du rapport Mueller pour multiplier les enquêtes parlementaires contre le président républicain et son entourage à la Chambre, où leur majorité leur donne de vastes pouvoirs d’investigation.
A ce titre, ils ont présenté une injonction pour recevoir des documents sur les finances personnelles du milliardaire et de plusieurs de ses sociétés. Or des avocats de Donald Trump ont lancé lundi des poursuites afin d’empêcher le cabinet comptable de s’y plier.
Depuis qu’il a repris le contrôle de la chambre basse en janvier, « le parti démocrate a déclaré une guerre totale contre le président Donald J. Trump », écrivent ces avocats dans leur plainte.
« Les injonctions sont leur arme préférée ».
AFP