Tribune. Les premiers contacts avec les arabes, qui ont occasionné la pénétration de l’islam en Afrique, avaient à l’origine une visée plutôt commerciale que religieuse. La rapide diffusion de l’islam en terre africaine ne s’est pas faite par le sabre.
Elle a été favorisée par la similitude et la concordance des principes humanistes de l’islam et les dispositions de mansuétude profondément ancrées chez les africains.
La Guinée en particulier a développé de ce brassage de vertus une longue et forte tradition d’islam de paix et de vivre-ensemble harmonieux. La protection dont bénéficie notre pays du ‘’jihadisme’’ s’explique par la grâce de Dieu sous-tendue par cette disposition de tolérance chère à nos populations. Il est essentiel de capitaliser sur ce précieux acquis, plutôt que de l’éroder par des mesures contreproductives.
Notre pays est pauvre. Ses priorités sont nombreuses. L’État n’est pas en mesure de soutenir certaines formes de politiques coûteuses. Il ne finance pas les ONG’s. Il incombe à celles-ci la charge de développer des partenariats susceptibles de les faire fonctionner. Ce qui du coup décharge l’État de certaines responsabilités.
Vu sous l’angle de la prévention du terrorisme, l’assèchement de sources de financement de celui-ci est salutaire. Cependant, ces dispositions pour le faire doivent être fondées sur des études d’impact, sous peine de sacrifier de nombreuses organisations religieuses utiles au pays.
Il est fort à craindre que le discernement ne soit au rendez-vous dans l’application des dernières mesures présidentielles au Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation sur les financements extérieurs au bénéfice des organisations religieuses nationales.
En 2019, le Conseil Islamique de Guinée a développé un programme de renforcement de capacité à la prévention de la violence / consolidation de la paix pour 400 imams pairs-formateurs. Ceux-là ont repiqué l’expérience tirée de la formation sur 4.000 autres imams/prédicateurs dans 40.000 mosquées visées par le programme.
Le projet rendu possible grâce à un financement de 70.000 Euros obtenu du Ministère allemand des Affaires Étrangères via la Fondation Zivik a touché l’ensemble du territoire national. Les nombreux témoignages des partenaires nationaux et étrangers font foi du succès obtenu par ce programme. Les démembrements du Secrétariat Général des Affaires Religieuses, en écho des larges franges de la population, réclament avec persistance le repiquage du projet dans les meilleurs délais.
Au-delà, a-t-on considéré le volume impressionnant d’infrastructures réalisées en Guinée grâce à cette source de financement en termes de mosquées, écoles, centre de santé, forages, ouvrages de franchissement, routes reprofilages, d’implantation et entretien d’orphelinats, de dons aux indigents ?
Sait-on combien de cadres jeunes et moins jeunes ont été formés ou sont en voie de l’être par ce moyen ?
Sait-on combien de projets actuellement soumis aux partenaires, ou en voie de l’être dans les deux domaines précités risquent d’être compromis par cette mesure ?
Il est important que l’Autorité revoit plus sérieusement l’esprit et la lettre de cette mesure en apparence protectrice du terrorisme, mais en réalité assassine des organisations religieuses.
Que Dieu nous inspire le mieux pour le plus grand bien de notre chère Guinée. Amen !!!
Sény Facinet Sylla
Ancien Secrétaire Général Adjoint des Affaires Religieuses