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Amadou Diallo BBC : « J’ai entendu Thiegboro dire aux leaders celui qui parle encore, je le rentre-dedans..»

Amadou Diallo, ancien correspondant de la de la Radio BBC en Guinée a comparu ce mardi 17 octobre 2023, devant le Tribunal criminel de Dixinn dans le cadre des événements douloureux du 28 septembre 2009.

À  la barre, le journaliste à la retraite a fait savoir qu’il est arrivé ce jour au stade avant l’arrivée des leaders politiques constitués forces vives de Guinée. Il a ensuite rapporté des propos du colonel Moussa Thiegboro Camara adressés aux manifestants alors qu’il essayait de convaincre les leaders politiques de reporter leur manifestation.

« J’ai entendu Colonel Thiegboro Camara Secrétaire général (chargé de la lutte antidrogue et grand banditisme à l’époque)dire que celui qui parle encore, je le rentre-dedans, moi suis bien éduqué, je parle aux leaders…», rapporte-t-il à la barre.

Selon ce témoin oculaire, la débandade totale a pris de l’ampleur lorsque la garde présidentielle est entrée au stade : « Ça tirait partout, il y avait une folle bousculade. J’ai interpellé mon ami Mouctar (correspond de RFI, ndlr) qui courait. Je lui ai dit : nous on ne court pas. Nous ne sommes pas des manifestants, mais des journalistes. J’ai imaginé que le pire qui pouvait nous arriver, c’était l’arrestation. Nous sommes restés arrêtés-là. Un jeune soldat est venu nous trouver, il nous a demandé ce que nous faisions là. Nous lui avons répondu que nous sommes des journalistes, il a braqué alternativement son fusil sur nous, il nous a agenouillés en nous disant que c’est vous qui vendez la Guinée à l’étranger. Il nous a demandé de mettre les mains sur la tête. À cet instant précis, j’ai pensé qu’il voulait nous exécuter. C’est un officier militaire qui a dit au soldat : ” laisse-les, ce sont des journalistes, nous étions ensemble à Labé”».

Amadou Diallo affirme avoir vu les manifestants se faire violenter par les forces de défense et de sécurité : « Même notre sauveur était en train de tabasser, de violenter les manifestants. J’ai vu des personnes tuées, blessées qui criaient à l’aide ».

Les journalistes Mouctar Bah de RFI et Amadou Diallo de la BBC ont été conduits hors du stade par un policier sous l’ordre de l’officier qui a demandé au jeune militaire de ne pas les agresser. À quelques mètres de la terrasse du stade, ils ont été interpellés par deux autres militaires : « Lorsque nous sommes arrivés en face de la station totale de Dixinn, nous sommes tombés sur un groupe de gendarmes habillés en tee-shirts noirs, ces derniers se sont déchaînés contre nous comme le jeune militaire à l’intérieur du stade. Ils ont dit : “, c’est vous qui vendez la Guinée à l’étranger, mais on va faire la fête, vous allez voir ce qu’on va faire avec vous”. Ils ont pris tout ce que l’on possédait (argent, téléphones). Un d’entre eux m’a pris la main gentiment, a sorti un poignard et m’a assommé au niveau de la main qui s’est enflée instantanément» a-t-il raconté à la barre soutenant qu’il fait passer son reportage sur la BBC malgré toutes ses souffrances. C’est pourquoi, il a rassuré qu’après avoir diffusé cet élément, il a été  contraint de quitter le pays pour s’exiler au Sénégal où il est resté avec sa famille jusqu’à sa retraite internationale.