Tribune. Aucun homme qui a une once d’humanité ne peut être insensible face aux images insoutenables provenant de la guerre en cours entre l’Israël et le mouvement Hamas, organisation politico-militaire palestinienne qui gouverne la Bande de Gaza, l’un des deux territoires de la Palestine. Des innocents, aussi bien Israéliens que Palestiniens, périssent en masse depuis le 7 octobre dernier. Comme si l’hécatombe survenue à l’hôpital de Gaza est la première, les dirigeants occidentaux font semblant de s’émouvoir. Certains d’entre eux, comme le président américain, se précipitent à dédouaner carrément Israël avant même une quelconque enquête. Pour évidemment désigner le coupable invariable à leurs yeux dans ce conflit : les Palestiniens.
De quoi se mêle un Africain ?
Certains estiment que l’Afrique a suffisamment des problèmes pour se mêler de ceux des autres. Ce n’est pas une excuse. Devant de telles tragédies, l’humanité entière doit s’y intéresser. Peu importe notre identité ou religion, tous nous devons avoir de l’empathie pour les familles qui assistent au déchiquetage de leurs enfants dans des conditions totalement inhumaines. Les enfants survivants de ces atrocités, une fois devenus grands, n’auront qu’une seule obsession : venger les leurs. D’où le cercle vicieux de vengeances et leurs corolaires de représailles. A ces atrocités s’ajoutent évidemment le blocus interminable de Gaza (qui empêche l’accès aux produits de premières nécessités par la population), la colonisation, la profanation des lieux saints des Palestiniens. La liste n’est pas exhaustive. De cause à effet, la vengeance de ces derniers est constamment condamnée par les Occidentaux. Ce qui conforte le sentiment de deux poids deux mesures dans ce conflit vieux de 75 ans.
L’origine du conflit
Il n’est pas superflu de revenir sur l’origine de ce conflit. Auquel les historiens consacrent suffisamment de littératures. Même les livres saints nous racontent l’histoire du Prophète Moïse et de son peuple. Lesquels subirent toutes sortes d’injustice et d’humiliation perpétrées par les Pharaons d’Égypte. Hitler enfonça le clou avec la Shoah qui causa l’extermination de près de six millions de juifs durant la Seconde Guerre mondiale.
À l’issue de ce conflit, l’ONU naissante veut trouver une patrie pour le peuple martyr juif. Elle déshabille Paul pour habiller Pierre. Les Palestiniens doivent partager leurs terres avec les Israéliens. Le « sionisme », (doctrine et mouvement politique visant la construction, la consolidation et la défense d’un Etat juif en Palestine), s’accélère. Une fois que les Israéliens se sont installés, ils ne veulent plus voir les Palestiniens. Fort du soutien des Occidentaux, plus particulièrement des Etats-Unis, Israël remportera toutes les guerres qui l’opposent aux pays arabes dont les plus emblématiques furent la Guerre de Six Jours et la Guerre du Kippour (guerre de Ramadan). Les Palestiniens n’ont que les yeux pour pleurer. C’est là que se trouve l’origine du « terrorisme » dont on parle aujourd’hui. Ces enfants palestiniens, puisqu’ils n’ont même pas un Etat pour s’engager dans l’armée et combattre l’ennemi dans un conflit conventionnel, deviennent eux-mêmes une bombe humaine. Mourir pour tuer d’autres et faire mal au camp d’en face est leur rêve le plus sacré. D’où le phénomène de kamikaze.
Éviter le deux poids deux mesures
Il ne s’agit nullement de justifier l’injustifiable. Comme le massacre des plusieurs innocents israéliens et étrangers le 7 octobre 2023. Ces actes sont ignobles et barbares. Mais ils ne le sont pas moins que ce que les alliés d’Israël appellent la légitime défense israélienne. Dans les différentes communications des Occidentaux relatives à cette attaque, ces derniers estiment qu’Israël a le droit de se défendre. Mais pourquoi, alors, avec les puissants services de renseignements israéliens, l’Etat hébreux n’irait pas attaquer les responsables du Hamas dans leur retranchement ? Pourquoi aucun responsable des pays alliés d’Israël n’a condamné la punition collective.
Avant le bombardement de l’hôpital de Gaza, la mort de près de 700 enfants palestiniens n’avait suscité aucune réaction. A plus forte raison le blocus de la ville, avec coupure d’eau, d’électricité, de privation de médicaments et de vivres dans l’enclave de Gaza[IK1] [U2] . Par leur silence face à ce que l’on peut qualifier de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, les dirigeants occidentaux ont clairement fait leur choix : celui de l’oppresseur. Ce silence donne l’impression qu’il y a d’un côté les Israéliens dont la vie compte et de l’autre les Palestiniens qu’on peut massacrer et priver du droit le plus élémentaire. Si même le criminel a droit à l’eau et à la nourriture, que dire de l’innocent ? Comme les enfants de zéro à 15 ans qui vivent dans la bande de Gaza. Sans compter que personne ne peut prouver que tous les adultes sont tous des partisans du Hamas.
La peur d’être taxé d’antisémite
Dans les sociétés occidentales, il existe généralement la contradiction. Et elle est admise et tolérée. Sauf que pour le cas palestinien, on a l’impression qu’il n’existe aucun autre son de cloche. A quelques exceptions près. Comme Jean-Luc Mélenchon, de la France insoumise, qui a la témérité d’aller à contre-courant du concert de soutien à l’Israël. Pour sa part, Emmanuel Macron s’écarte de la voie tracée par ses prédécesseurs. En particulier François Mitterrand et Jacques Chirac. Lesquels clamèrent et proclamèrent que la France est une amie du peuple palestinien. Chirac en particulier a montré l’indépendance de la France par rapport à la toute puissante Amérique à l’occasion de la guerre du Golfe, qu’il avait refusé de cautionner.
Quant à Joe Biden, il déclare que les Etats-Unis sont prêts à envoyer des soldats pour appuyer au besoin l’armée israélienne. Si ce discours était sorti de la bouche de son prédécesseur direct, on aurait pu comprendre. Donald Trump fut le seul dirigeant occidental à envisager de transférer l’ambassade de son pays à Jérusalem. En tant que démocrate ayant promis d’opérer une rupture radicale avec la politique de Trump, Biden aurait dû œuvrer, depuis son accession à la Maison-Blanche, à renouer le fil du dialogue entre l’Israël et la Palestinine. A travers notamment les Accords d’Oslo de 1993 qui prévoyaient la solution portant sur la création de deux États israélien et palestinien côte à côte. Si le discours va-t’en guerre et les massacres de masse étaient la solution, il n’y aurait jamais eu les événements tragiques du 7 octobre 2023. Ces massacres sont la preuve que la seule et l’unique solution demeure les négociations.
Malheureusement, on est loin de cette solution. Tant les massacres du 7 octobre ont apporté de l’eau au moulin à Israël. Lequel a obtenu un soutien quasi unanime de l’Occident. Aussi bien au niveau politique qu’au niveau médiatique. A écouter les médias, on a l’impression que la cause palestinienne est devenue un tabou. Rares sont ceux qui osent le soutenir publiquement.
Les Africains doivent se faire entendre
Dans un contexte international marqué par une nouvelle guerre froide, les Africains devraient saisir l’occasion pour faire entendre un autre son de cloche. Condamner le massacre des innocents Israéliens mais aussi Palestiniens. Cela ne relève pas d’une neutralité hypocrite. Mais du courage de s’indigner devant toutes les horreurs. Quel que soit le camp qui les commet. Si les hommes politiques ne le font pas, les intellectuels du continent noir, eux, doivent le faire. Pour dire clairement qu’ils sont contre le terrorisme palestinien, mais aussi le terrorisme israélien. Car le massacre des innocents n’a d’autres qualificatifs que le terrorisme. La seule différence c’est le terrorisme d’un parti politique qui est le Hamas et celui d’un État, l’Israël.
Je voudrais terminer par l’horrible prise d’otages. Un acte condamnable. Mais entre un preneur d’otages innocents et un tueur de civils tout aussi innocents, qui est plus criminel ? L’otage espère être libéré un jour, quel que soit le prix à payer par les siens. Tandis que celui qui est mort ne reviendra jamais !
Habib Yembering Diallo
Journaliste-écrivain
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