16 avril 2021. La nouvelle est rendue publique. La Guinée n’a pu accéder à la première étape du Millenium Challenge Corporation (MCC) lui ouvrant un financement substantiel pour n’avoir pas rempli la moitié des critères de base qui sont de 10 sur 20. Pour en saisir l’essence, il convient d’appréhender le programme en ses critères et processus avant d’esquisser des pistes de solution.
En quoi consiste le Programme Millenium Challenge Corporation ?
D’emblée, il faut rappeler que le Programme Millenium Challenge Corporation (MCC) est un partenariat de développement entre les Etats-Unis et les pays en développement crée par le Congrès américain en 2004. L’économie du partenariat permet de relever ce qui suit : le programme verse des subventions significatives pour le développement à des pays en développement qui ont démontré leur engagement dans la promotion de bonnes pratiques en matière de gestion, de réforme économique et de gouvernance démocratique.
Il s’agit ainsi d’un programme fondé sur la volonté et la capacité du pays bénéficiaire à se prendre lui-même en charge par la création d’un environnement économique et démocratique favorable à l’éclosion des projets de développement. Pour bénéficier des subventions au compte du MCC, le pays doit satisfaire les trois critères que sont la liberté économique, l’investissement dans les ressources humaines et la gouvernance. Ces critères comprennent eux-mêmes vingt indicateurs allant de la liberté économique à la lutte contre la corruption, en passant par le respect des libertés politiques. Ces indicateurs sont puisés dans un panier d’indices en provenance tant d’institutions internationales que d’organisations non gouvernementales et autres agences de notation comme la Banque Mondiale, le FMI, l’Unicef, Transparency international,…
Le processus obéit à deux étapes. La première est l’accès à la subvention pré-compact ou limite lorsque le pays atteint la moitié des critères dont obligatoirement ceux portant sur la lutte contre la corruption et les droits démocratiques. La seconde consiste en l’accès à une subvention plus consistance, la subvention compact, d’une durée de cinq ans, étape nécessitant pour le pays bénéficiaire de remplir l’essentiel des critères sus indiqués. La Guinée, notre pays, tente de s’inscrire à la première étape. Elle vient fort malheureusement d’être recalée. Que faut-il faire pour accéder à cette importante manne nécessaire aux financements des programmes de développement du pays ?
Que faudrait-il à faire pour la Guinée ?
N’ayant pu accéder à cette première étape, le gouvernement guinéen a émis un communiqué insistant surtout sur une communication efficiente sur les efforts de la Guinée pour atteindre les critères définis par le MCC et sur la nécessité de produire de statistiques fiables et actuelles. Ce sont certes des avenues possibles mais il est possible d’explorer, à notre humble avis, des pistes plus durables.
En sus de procéder à l’amélioration de la communication et de la collecte des statistiques, la Guinée devrait aussi et surtout se pencher à la consolidation des contenus des critères du MCC. En guise d’illustration, citons quelques aspects. La liberté de la presse en Guinée est au point le plus bas dans le rapport de Reporters Sans Frontières; un accent sur la mise en œuvre efficiente de la L.002 en la matière en évitant l’incarcération des journalistes améliorerait le critère de libertés civiles. Du point de vue du droit de manifestation pacifique, la Guinée figure au bas du tableau des rapports de plusieurs Ongs de droits de l’homme comme Human Rights Watch ou Amnesty international; le respect du droit à une manifestation pacifique et bien encadrée serait également de nature à inscrire notre pays au bon niveau et satisfaire le critère des libertés démocratiques. En sus du contenant, il est salutaire d’agir sur le contenu. Pour finir, au-delà de l’accès au Millenium Challenge Corporation, la Guinée a l’impérieux devoir de s’engager à des véritables réformes économiques et démocratiques pour amorcer son développement harmonieux au bénéfice de toutes et tous les guinéens.
Conakry, le 19 avril 2021
Dr Thierno Souleymane BARRY,
Docteur en droit, Université Laval/Université de Sherbrooke (Canada)
Professeur de droit, Consultant et Avocat à la Cour