Tribune. Si le président congolais a promis, dans la perpective d’une réforme constitutionnelle, de veiller « à ce que personne ne touche à des dispositions intangibles », le rapport de force au Parlement ne lui est pas favorable. Pour le politologue Isidore Kwandja Ngembo, le risque est donc grand d’ouvrir ainsi la boîte de Pandore.
Lors de son tout premier discours sur l’état de la Nation, devant les deux chambres du Parlement réunies en Congrès, le président congolais Félix Tshisekedi a clairement appelé députés et sénateurs à engager une réflexion sur plusieurs modifications constitutionnelles.
Parmi elles, la possibilité de revoir le mode de scrutin pour les élections des gouverneurs et sénateurs, de revenir à une élection présidentielle à deux tours, et de réviser les dispositions de l’article 10 de la Constitution qui consacrent la règle de l’unité et de l’exclusivité de la nationalité congolaise.
Cela voudrait dire qu’il faudrait rouvrir le débat politique sur la réforme constitutionnelle. Les alliés du Front commun pour le Congo (FCC) ont saisi la balle au bond, en appuyant l’idée du chef de l’État de réviser la Constitution, mais pas forcément pour les mêmes raisons que celles évoquées par Félix Tshisekedi.
En théorie, l’idée n’est pas mauvaise. Mais dans la pratique, il est légitime de se demander si Félix Tshisekedi sera en mesure d’encadrer le débat au Parlement pour éviter tout débordement sur des sujets sensibles, lui qui n’y dispose pas de majorité.
Risque de dérapages
Il ne fait aucun doute que les préoccupations exprimées par le président Tshisekedi, notamment au sujet de la double nationalité, sont fondées.
À ce jour, on estime que près de 8 millions de Congolais vivent à l’étranger pour des raisons politiques ou économiques, et une bonne partie d’entre eux aurait acquis la nationalité du pays d’accueil en vue de leur intégration. Beaucoup souhaitent regagner leur pays d’origine, s’y installer définitivement, y investir ou démarrer une entreprise. D’autres voudront bien mettre la main à la pâte et contribuer à la reconstruction politique et économique.
L’intention d’amender la Constitution pour résoudre définitivement cette question de la double nationalité – au point mort depuis l’adoption, le 12 février 2007, du moratoire sur la mise en application de la législation congolaise en matière de nationalité – , réjouit les membres de la diaspora congolaise. Il faut le reconnaître : ces derniers ont joué un rôle important dans la lutte pour cette alternance démocratique, au-delà de l’envoi de fonds aux membres de leur famille ayant contribué à l’apaisement de la tension sociale au pays.
Par Isidore Kwandja Ngembo
Politologue et ancien conseiller à la direction de l’Afrique centrale et occidentale au ministère canadien des Affaires étrangères et du commerce international.