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Évaluation des  politiques minières en Afrique : la RDC, le mauvais exemple, la Guinée s’abstient

L’Institut Fraser a publié la semaine passée son sondage annuel auprès des compagnies minières sur leurs perceptions de l’attractivité des juridictions dans lesquelles elles opèrent. Alors qu’on assiste en Afrique, depuis une année, à une vague de réformes de législations minières, il est intéressant de connaître le point de vue des investisseurs étrangers sur cette évolution de l’environnement des affaires dans 10 pays miniers africains majeurs.

10 pays africains…

Pour réaliser son classement 2018, Fraser Institute a analysé les réponses de 291 acteurs, majoritairement des dirigeants de compagnies minières, au sujet des facteurs qui influencent leurs décisions à investir dans les pays. Entre autres facteurs, on retrouve les réglementations mises en place par les gouvernements, le système légal, le régime de taxation, les infrastructures, la stabilité politique, les lois concernant le travail.

Seuls 10 pays africains ont obtenu le seuil minimal de réponses pour figurer dans le classement, sur les 83 nations au plan mondial. Ainsi, de grandes juridictions minières comme l’Angola, la Côte d’Ivoire, la Guinée, le Maroc ou encore la Mauritanie et le Sénégal ont été écartés pour insuffisance de réponses.

Fraser Institute a accordé à chaque pays, selon les réponses obtenues un indice d’attractivité globale. Cet indice composite est déterminé à partir d’un indice de potentiel minéral qui évalue si la géologie des pays encourage ou décourage les investissements dans l’exploration et d’un indice de perception des politiques minières.

Botswana, l’exemple à suivre…

Selon le rapport, l’Afrique se classe au 2e rang des régions les moins attractives pour l’investissement dans les mines. Le Botswana est la juridiction africaine la mieux classée (32e), suivie de l’Afrique du Sud (43e) et de la Zambie (45e). Les pays africains les plus mal classés comprennent l’Ethiopie (77e mondial), le Ghana (68e) et la RDC (67e).

Le Botswana, No1 en Afrique en ce qui concerne la perception des politiques minières.

«Le régime fiscal du Botswana continue d’être exemplaire par rapport aux autres juridictions africaines et encourage l’investissement dans l’exploration», a déclaré un vice-président de compagnie d’exploration à Fraser Institute.

«Le régime fiscal du Botswana continue d’être exemplaire par rapport aux autres juridictions africaines et encourage l’investissement dans l’exploration», a déclaré un vice-président de compagnie d’exploration à Fraser Institute.

Ainsi, c’est sans grande surprise que le pays termine No1 en Afrique en ce qui concerne la perception des politiques minières, qui compterait pour 40% dans les décisions d’investissement. Souvent loué pour ses bonnes pratiques minières, le pays a même amélioré son score par rapport à l’année 2017 où il était classé 21e sur 91 pays. Cette performance reflèterait la diminution des inquiétudes des investisseurs au sujet des barrières commerciales et de la stabilité politique.

Juste derrière le champion africain se trouve la Namibie (36e au plan mondial) et la Zambie (53e). L’institut explique le score de la Zambie par la diminution des préoccupations liées à la stabilité politique, les infrastructures et le cadre juridique. Toutefois, il faut souligner que depuis l’introduction en début d’année 2019 de nouvelles lois qui augmentent les redevances et taxes minières, le pays s’est mis à dos la plupart des compagnies opérant sur son sol.

La RDC, le mauvais exemple

La RDC est le pays africain le plus mal classé selon l’indice de perception des politiques minières (82e). Il ne devance au plan mondial que le Venezuela.

RDC : un nouveau code minier augmente les redevances et impose de nouvelles taxes.

«La récente augmentation unilatérale du taux de redevance en RDC décourage les investissements», s’inquiète un dirigeant, alors qu’un autre patron cité dans le document évoque le «manque de clarté sur les limites des concessions minières d’exploration et les cas de corruption».

La RDC a promulgué l’année passée un nouveau code minier qui augmente les redevances et impose de nouvelles taxes. Les dirigeants de compagnies minières (photo de Une) s’étaient alors opposés aux réformes, estimant risquer d’importantes pertes financières. Pour « protéger leurs droits », elles ont menacé d’intenter une action en justice contre le gouvernement.

Au Mali, les investisseurs se sont montrés de plus en plus préoccupés par la réglementation et les contrats de travail, le système juridique et la disponibilité de la main-d’œuvre et des compétences.

Se retrouvent également dans les dernières loges des pays comme l’Ethiopie (71e) et le Zimbabwe (76e). Il faut aussi noter la mauvaise performance du Mali, qui a connu le déclin le plus important sur le continent (46e sur 91 en 2017 à 63e sur 83 en 2018). Les investisseurs se sont montrés de plus en plus préoccupés par la réglementation et les contrats de travail, le système juridique et la disponibilité de la main-d’œuvre et des compétences.

Des pays aux énormes potentiels

D’une manière générale, les mauvais scores des pays africains concernant les politiques minières ont été compensés par la richesse de leurs sous-sols. En en tenant compte uniquement de l’indice de potentiel minéral, la RDC (24e) est le pays africain le plus attractif pour l’investissement dans l’exploration. Elle est suivie de l’Afrique du Sud (30e) et du Mali (38e). Le point commun de tous ces pays est leur grande richesse minérale.

En en tenant compte uniquement de l’indice de potentiel minéral, la RDC (24e) est le pays africain le plus attractif pour l’investissement dans l’exploration. Elle est suivie de l’Afrique du Sud (30e) et du Mali (38e).

Le sous-sol congolais héberge d’énormes réserves de cuivre, de cobalt, et d’autres minéraux prisés, alors que l’Afrique du Sud est riche en métaux du groupe du platine et autres matières premières très utilisées comme le nickel, ou même le charbon. Au Mali, le secteur aurifère est en plein essor et les potentielles grandes réserves attirent plusieurs compagnies d’exploration.

Classement 2018 des 10 pays africains selon l’indice d’attractivité globale de Fraser

  1. Botswana (32e mondial)
  2. Afrique du Sud (43e)
  3. Zambie (45e)
  4. Mali (50e)
  5. Namibie (60e)
  6. Zimbabwe (62e)
  7. Tanzanie (66e)
  8. RDC (67e)
  9. Ghana (68e)
  10. Ethiopie (77e)

Ashley Stedman : « Les investisseurs expriment de plus en plus de préoccupations au sujet de la sécurité et de la stabilité politique dans de nombreux pays.»

Ashley Stedman

Analyste principale des politiques chez Fraser Institute, Ashley Stedman est coauteure d’un certain nombre d’études du think tank canadien, dont le Global Petrolum Survey et le Survey of Mining Companies. Elle explique à l’Agence Ecofin les performances de la RDC et du Mali, les deux pays africains francophones du classement.

En 2018, la RDC a promulgué un nouveau code minier. Selon les réponses que vous avez reçues pour ce pays, à quel point cette réforme a-t-elle pesé sur son indice d’attractivité ?

Notre sondage pose des questions générales sur 15 facteurs stratégiques (fiscalité, réglementation environnementale, etc.), ce qui signifie que nous ne sommes pas en mesure de commenter l’incidence de décisions stratégiques précises. Cependant, les répondants s’accordent tous sur le fait que le principal domaine où la RDC a le plus besoin d’améliorations concerne les accords socioéconomiques et les conditions de développement communautaire. En outre, les deux autres grands facteurs dissuasifs comprennent le cadre légal (90% des répondants sont découragés) et l’incertitude concernant l’administration, l’interprétation ou l’application des régulations existantes (90% des répondants découragés).

Le Mali a quant à lui perdu plusieurs points en ce qui concerne l’indice de perception des politiques alors que, contrairement à la RDC, il n’a pas encore modifié son code minier. Qu’est-ce qui explique cela ?

AS : Les résultats montrent qu’entre 2017 et 2018, les répondants ont exprimé une inquiétude croissante concernant la réglementation du travail et les accords d’emploi au Mali (+54 points de pourcentage), le système juridique (+39 points de pourcentage) et la disponibilité de la main-d’œuvre et des compétences (+37 points de pourcentage). L’inquiétude croissante dans ces domaines a contribué à la baisse du classement du Mali. Nous ne pouvons toutefois pas dire quelle éventuelle incidence de nouvelles décisions stratégiques (comme la révision du code minier, NDLR) auront sur le classement du pays.

AE : Les classements comme le vôtre aident les compagnies dans leurs décisions d’investir ou pas dans un pays. Que peuvent faire les pays africains pour changer l’image de «zone risquée à environnement minier difficile» accolée au continent, et devenir des exemples comme le Canada et l’Australie ?

AS : En général, les administrations qui ont des taux d’imposition compétitifs et des régimes de réglementation solides ont tendance à obtenir de meilleurs résultats dans l’enquête. Nous remarquons également que les investisseurs expriment de plus en plus de préoccupations au sujet de la sécurité et de la stabilité politique dans de nombreux pays en développement, comparativement aux résultats des États-Unis, du Canada et de l’Australie. Nous sommes toujours à la recherche de moyens d’augmenter notre taux de réponse et le nombre de juridictions que nous incluons. Nous encourageons donc les cadres et dirigeants miniers à participer au sondage en nous contactant.

 

 

 

Avec agenceecofin

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