Les révélations des médias portant sur le détournement présumé de plus de 200 milliards de francs guinéens par la ministre de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle, Zénab Nabaya Dramé, est loin de son épilogue.
La bataille de procédure se poursuit sur la nécessité de l’ouverture du procès avant les conclusions de l’enquête du Procureur de la République saisi par le Gouvernement de la République d’un coté et de l’autre la caution à verser avant le début de la confrontation des parties prenantes à la barre.
Il faut d’emblée rappeler qu’il n’y a pas de périls en la demeure !
D’abord les faits reprochés aux trois médias sont commis par voie de presse, et selon la Loi organique portant la liberté de la presse, la procédure indiquée est la citation directe !
En de tels pareils cas, s’agissant des journalistes détenteurs de la carte de presse, il n’y a pas de détention préventive au terme de la Loi organique L/002/CNT du 22 juin 2010 portant sur la liberté de la presse en ses articles 17 et suivants.
En d’autres termes, le tribunal est en face de deux (2) procédures en matière correctionnelle, l’une faite par le Gouvernement en portant plainte contre ces médias au près du Procureur de la République près du Tribunal de Première Instance de Kaloum qui, à son tour, communique le dossier à un juge d’instruction et l’autre par la voie de la citation directe par madame Zénab Nabaya DRAME.
Par ailleurs, il est important de rappeler que le Tribunal ne peut se fonder sur la Loi ordinaire portant sur la Cyber sécurité et la protection des données à caractère personnel, pour condamner ces médias, alors que la Loi, qui sied en la matière, est la Loi organique L/002/CNT du 22 juin 2010 portant sur la liberté de la presse en ses articles 108 et suivants.
Et pour plus de précision, l’article 109 de ladite Loi organique dispose : « La diffamation, par l’un des moyens énoncés à l’article 98, envers les Cours, les Tribunaux, les Corps militaires et paramilitaires, les Corps Constitués et les Administrations publiques, est punie d’une amende d’un million de francs à Cinq (5) millions de francs guinéens ».
Il convient en outre de signaler que la Loi organique L/002/CNT du 22 juin 2010 portant sur la liberté de la presse déroge toutes les dispositions contenues dans la Loi ordinaire L-2016-037 AN relative à la Cybersécurité et à la protection des données à caractère personnel, sur la base du principe de la prééminence de la Loi organique sur la Loi ordinaire susvisée. Le Tribunal ne peut aller au-delà !
Comme l’instruction du juge en charge de ce prétendu détournement prendra du temps, c’est pourquoi madame Zénab Nabaya Dramé est allée plus vite à la demande de ses conseils en vue de procéder à la citation directe, ne serait-ce que pour contourner le Procureur de la République. Et c’est aussi du droit !
L’on se demande, est-ce que le Procureur de la République près du Tribunal de Première Instance de Kaloum a été régulièrement saisi d’une plainte par l’Agent judiciaire de l’État qui a pour mission de défendre les intérêts de l’État et de ses démembrements dans les règles de l’art ?
Quant à la procédure de la citation directe, le Tribunal a l’obligation de statuer avant le débat au fond de discuter de la caution à payer par la victime ; si cette question est évacuée, le Tribunal renvoie l’audience à la date de sa convenance après que le Greffe dépose le reçu attestant le paiement de la caution.
En d’autres termes, la procédure de citation directe déposée par madame la ministre à travers ses conseils n’a rien à voir avec la procédure entamée par le Procureur de la République près du Tribunal de Première Instance de Kaloum de par sa nature !
Par ailleurs, la nouvelle génération de journalistes voulant embrasser le journalisme d’investigation devrait s’inspirer des modèles en la matière notamment messieurs Latif Coulibaly du Sénégal et Tibou Kamara de la Guinée !
Moussa Iboun Conté