Tribune. L’ère du numérique et le phénomène des “fake news” dans les pays développés où les mentalités sont supposées être plus matures en matière de civisme et de démocratie, ont montré les limites de l’encadrement de la liberté d’expression et de protection contre la nocivité des mauvais influenceurs d’opinion.
Qu’ils soient des politiques (les populistes extrémistes), des activistes (sectes, milices, blogueurs anarchistes) ou des libres penseurs, les possibilités de se tailler une parcelle de pouvoir pour impacter l’orientation de la vie de la société, deviennent de plus en plus grandes.
Qu’en est-il de la situation dans notre pays ?
La faiblesse de nos institutions, l’irresponsabilité des dirigeants, la méconnaissance des réglementations, l’impunité et le manque de maturité des populations, ont généré un désordre indescriptible sur la place publique de sorte que n’importe qui peut prétendre être important au point de renverser les codes et pratiques les plus sacrés de la société.
Que cela soit à travers les médias classiques ou les réseaux sociaux, on assiste à une sorte de jungle qui contribue chaque jour un peu plus à enfoncer notre pays dans la haine, la désinformation, l’intoxication, la calomnie etc. Ce qui en soi a rendu désagréable la vie publique par ses conséquences négatives sur le vivre ensemble, les relations interpersonnelles et l’équilibre de notre société.
Que faut-il faire pour y remédier ?
En attendant d’avoir un État responsable, juste et soucieux du bien-être des populations et de l’efficacité des institutions telle que la HAC, il serait souhaitable que les médias et partenaires de cette corporation prennent des initiatives allant dans le sens d’une correction progressive de cet état de fait qui expose notre pays à tous les dangers :
> Faire recours à des spécialistes pour analyser et décrypter les passages des invités des émissions de grande écoute
> Refuser de tendre le micro, de relayer et d’accorder des temps d’antenne à tous ceux qui tiennent des propos irresponsables et potentiellement préjudiciables au vivre ensemble
> Appliquer rigoureusement la législation qui sanctionne les propos tendancieux qui sapent les fondements du vivre ensemble à travers un monitoring de l’espace audiovisuel et des réseaux sociaux.
> Imposer le débat contradictoire structuré et dénoncer ceux qui refusent de s’y soumettre pour des raisons fallacieuses
> Encourager et promouvoir l’engagement politique et citoyen, et la prise de parole de ceux qui ont plus de crédibilité et de représentativité
> Donner beaucoup plus d’espace d’expression aux analystes en langues nationales et aux structures de sondage pour améliorer l’implication et la compréhension citoyenne
> Sensibiliser les populations à s’intéresser beaucoup plus aux comptes sociaux instructifs, valorisants et respectueux de l’éthique qu’aux pages sociales qui incitent à la violence, la haine et les règlements de comptes.
Enfin, il est indéniable que chaque société a ses fous, ses opportunistes, ses démagogues, ses égarés et ses idiots. Mais celles qui réussissent le mieux sont souvent celles qui savent comment les gérer afin qu’ils soient moins nuisibles.
Aliou BAH
Président du MoDeL