Le renard a pour métier la tromperie, les chiens défendent celui qui les nourrit, aboient et mordent quelques fois ceux qui s’en prennent ou viennent à leur maître ; les vipères inoculent leur venin à leurs sujets et les tuent sur-le-champ.
Les chevaux servent à des usages variés et finissent abandonnés quand ils ne servent plus à grand-chose et sont remplacés par d’autres étalons qui seront plus tard remplacés par d’autres, de meilleurs. Les punaises sont toujours incommodes et insupportables qu’on finit par les tuer à coups d’insecticides.
Les perroquets parlent à des sujets divers qu’ils n’entendent jamais. Les oiseaux de proie vivent de rapines. Les papillons cherchent le feu où ils finissent dans les braises. Les abeilles suivent la reine et produisent le miel qui fait du bien à l’homme. Les mouches fréquentent les lieux sales, se posent sur les déchets et engendrent des maladies.
Les frelons s’établissent au dépend des abeilles. Les canards attirent leurs semblables dans les rets des prédateurs. Les vautours vivent de corps morts et de pourriture. Ah ! certains animaux, en nombre plus grand, servent de nourriture à d’autres. Combien y a-t-il d’hommes qui ont des rapports aux animaux !
Certains hommes sont des caméléons, ils prennent toutes les couleurs ; d’autres sont des reptiles qui se tortillent en mille façons. Ils font des gambades, arrivent où le soleil lut, profitent de la dépouille de ceux que l’orage a culbutés. Quand ils sont bien, ils veulent encore plus. Ils sont malades et souffrent de cette vulgaire maladie : l’avidité. Ils veulent plus, mieux, ce qu’ils ne sauraient trouver dans leurs certitudes, opinions actuelles ; ainsi, ils se meuvent, ils bougent, ils culbutent afin de posséder plus et encore.
S’ils ont été ministres une fois, ils veulent encore venir à la soupe. Oui, être un ministre, ça paie. S’ils ont fait deux mandats légaux, ils veulent un troisième illégal et illégitime ; ils le veulent qu’ils soient prompts à l’exercer ou non, ils le veulent pour eux car sont malades : ils ne se contentent pas, ils sont incapables de réfréner leur appétit du pouvoir.
Ce sont elles les girouettes politiques ; elles changent de verbe ; ce qui était vrai hier ne l’est plus aujourd’hui pour elles. Ce qu’elles ont défendu aux autres ne doit pas leur être opposé, elles sont différentes. Voilà les déraisonnables ! Elles se disent : « le peuple décidera, lui seul dira ». Elles ne se laissent pas emporter par les soubresauts de l’opinion mais manipulent l’opinion en lui imposant un lexique, le leur et des intentions.
Elles ont des valets qui parlent en leur nom, font campagne pour elles ; l’une d’elles, la grande girouette a dit : « j’écoute le peuple ». Si le peuple décide de tout en tout temps et tout lien, on ne vit plus sous un régime démocratique. Elle reconnait que son régime est le contraire de la démocratie. Elles s’achètent aussi des perroquets et des lévriers d’attache qui ne vivent que de guerre.
Aux premiers, le deus ex machina dit : « soyez prêts pour la confrontation d’idées, n’ayez peur de rien, il vous sera donné des arguments ». Aux seconds, le factotum dit : « quand vous dansez avec un aveugle, marchez-lui dessus qu’il sente qu’il n’est pas seul ». Ils ont aussi des paons qui déplaisent par leurs chants.
Oui, le deus ex machina est une girouette, la plus grande que le pays a connu .Il est le maître des matois. Il est une girouette pour avoir dit, deux fois, qu’il respectera et fera respecté les termes de la constitution ayant fait de lui le premier président démocratiquement élu dont il s’enorgueillit d’être et avoir fait parjure.
Il a été communiste, il a abjuré le communisme pour le socialisme qu’il a abjuré au profit de libéralisme sans humanisme qu’il a tardivement embrassé. Au malade Guinée, il administre de piètres et incommodes remèdes. Pendant longtemps, il s’est battu pour qu’il accède au pouvoir et y finisse le reste de ses jours. Investi de la confiance du peuple, pour qui il s’est battu, disait-il, il oublie l’honneur qu’est d’être un président à un âge tardif.
Il avait dénoncé sans cesse les goûts forcenés du pouvoir de ses antécesseurs ; au pouvoir, il marche sur leurs traces et songe désormais à rebâtir la dictature sur fond d’usurpation du pouvoir avec les matériaux constitutionnels. Il entretient un humiliant contraste entre ses engagements d’hier et son mode d’exercice du pouvoir ; sa conduite et ses pensées.
Il fusionne les contraires : les promesses et les reniements, le beau langage occasionnel et les mauvaises pratiques, l’aspiration à la dictature et les éloges de son passé d’opposant à la dictature, l’amour de la médiocrité et l’espoir du progrès, le désir de dominer et l’aspiration à la justice sociale.
Oui, l’opinion de l’homme peut changer pourvue que sa conviction ne se meuve pas ; oui, il peut faire des palinodies pourvue qu’il ne tronque pas sa conscience. Oui, il peut aimer les girouettes vénales, opportunistes, dogmatiques, cérébrales, pourvue qu’il ne fasse pas l’apologie de la corruption morale. Etait-il un homme de conviction ? Il a pourtant fait quatre décennies de combat ? Pourquoi doit-il trainer dans la fange l’homme qu’il a été ?
Il a subordonné la compétence à la servilité, assassiné le travail qui est le pain de tous pour sustenter les flatteurs ; il a préféré les mines qui procure des rentes plus grandes bien qu’ayant de grandes externalités négatives plus grandes encore à l’agriculture qui nourrit.
Il a tué le citoyen pour avoir promu les contrevaleurs et le manichéisme, il attaque à présent la constitution après avoir porté l’estocade à la République qui doit élever chacun au rang de citoyen.
Oui, l’éloge de croissance économique ! Où sont ses fruits ? La croissance anémique du travail, plus de pauvreté, plus d’inégalités. Quel abus ! Emergence économique ? Quelle vérité !
Opportuniste, il sait tirer parti du pluralisme politique et de la famine qu’il sème depuis plus de neuf ans afin de donner un semblant de légitimité à la forfaiture qu’il prépare. Sous ses mandatures, il sera dit : il ne suffisait pas de travailler pour avoir son pain que le travail introuvable ne procure jamais, il fallait être un militant et un flagorneur et croire et dire que seul lui est capable.
Il a trahi, pour avoir soutenu ce qu’il a défendu aux autres : le goût forcené du pouvoir. Les résultats de cette trahison sont là et la grande partie est différée. Est-il un homme d’Etat ou un combinard professionnel ? Les résultats de sa trahison permettront de répondre à cette question.
Mandela, le vrai, a dit : « je laisse ma place à la relève ». L’autre dit : « s’il y a référendum, il y a troisième mandat ». Il a abjuré Mandela. Il rêve de devenir Biya, Sassou ou Deby. C’est son droit. La Guinée n’a pas besoin d’un autre dictateur après soixante années de fourvoiement national, elle est à la recherche du temps perdu.
Le renard, les chiens, les vipères, les chevaux, les punaises, les perroquets, les oiseaux à proie, les papillons, les mouches, les abeilles, les frelons, les vautours, tant de rapport aux hommes ! Le renard abuse, c’est son art la tromperie.
Ibrahima SANOH
Citoyen guinéen
Président du mouvement Patriotes Pour l’Alternance et le Salut