Après une longue analyse des dossiers de candidatures, le Conseil constitutionnel a rendu la liste des prétendants pour la présidentielle du 22 juin prochain. Sur la liste exceptionnellement large pour un scrutin présidentiel dans le pays, le Conseil constitutionnel a validé six candidatures. Entre un ancien ministre de la Défense, un ex-Premier ministre et des candidats d’une opposition en rangs dispersés, les contours de la course au palais se précisent et la succession de Mohamed Ould Abdelaziz ouverte. Voici le profil de la liste provisoire des candidats.
Quarante-trois jours seulement séparent les Mauritaniens de la présidentielle du 22 juin prochain, celle-là même qui désignera pour les cinq prochaines années, le successeur de Mohamed Ould Abdelaziz. Après une longue nuit (de mercredi à jeudi), le Conseil constitutionnel a finalement validé les six dossiers de candidature.
Dans une analyse minutieuse des dossiers pour établir une liste provisoire des candidatures, le Conseil constitutionnel a procédé à la vérification des 100 parrainages requis auprès des conseillers municipaux (dont au moins cinq maires). Pour l’heure, toutes les listes ont passé ce test décisif avant une transmission de la liste définitive, le 22 mai prochain, pour publication avant le lancement de la campagne électorale.
Mohamed Ould Ghazouani, pour assurer les arrières de Mohamed Ould Abelaziz
Pour les couleurs de la «majorité au pouvoir», l’Union pour la République (UPR), le parti de Mohamed Ould Abdelaziz, a choisi depuis longtemps Mohamed Ould Ghazouani. Compagnon du président mauritanien depuis plus de 3 décennies, ce général formé à l’Académie royale militaire de Meknès au Maroc, issu d’une famille de la puissante confrérie musulmane soufie Qaddriyya, est d’abord un homme du rang. A 63 ans, l’ancien ministre de la Défense, spécialiste du renseignement militaire cultive de puissants réseaux dont les tentacules s’étendent au sécuritaire lorsqu’il était Directeur général de la sûreté nationale (DGSN) après le coup d’Etat de 2008 qui porta son ami au pouvoir.
Ce dernier semble vouloir jouer des coudes pour protéger ses arrières en plaçant sur son fauteuil, un compagnon de route. Au vu des moyens, notamment d’Etat disent certains, déployés, l’on parle du sexagénaire comme du « très probable futur président de la République islamique de Mauritanie». Suffisant pour casser le moral du reste des candidats et donner l’impression d’une élection jouée d’avance?
Sidi Mohamed Boubacar, l’expertise de l’Etat
«Trop vite!», répond-t-on dans le camp du parti Tawassoul. Après avoir renoncé à sa candidature indépendante, Sidi Mohamed Boubacar a dû chercher des soutiens auprès du parti d’inspiration islamique. Et son expérience de l’Etat à des moments cruciaux dans l’histoire du pays plaide pour lui. Deux fois Premier-ministre sous les présidents Ely Ould Mohamed Vall et sous Maaouiya Ould Sidi Ahmed Tayaa, ce haut-fonctionnaire de 61 ans, cet ancien ministre des finances capitalise sur sa connaissance des rouages d’un Etat qui cherche encore à se consolider. Sur le volet international, Sidi Mohamed Boubacar fait valoir ses postes à plusieurs représentations diplomatiques de la Mauritanie dans plusieurs capitales européennes.
Biram Dah Abeid, au nom de l’abolition de l’esclavage
Leader du mouvement anti-esclavagiste, Biram Dah Abeid, se rêve en «Barack Obama de la Mauritanie», le pays n’a jamais eu de président noir de son histoire. A 55 ans, le fondateur de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA) jouera ses chances sous l’étendard de la coalition avec Sawab. Historien formé aux Universités de Nouakchott et Dakar, Biram Dah Abeid fait régulièrement la Une des médias nationaux et internationaux pour ses actions de dénonciation contre les Haratines, les Mauritaniens descendants d’esclaves dont il est issu. Plusieurs fois arrêté pour ses positions ou les manifestations organisées dans le pays, il est souvent le déclencheur de rapports internationaux qui étiquettent la Mauritanie sur le respect des droits de l’Homme.
Mohamed Ould Maouloud, le rassembleur
De son côté, Mohamed Ould Maouloud, le chef de l’Union des forces du progrès (UFP), a fait litière de l’échec de l’opposition à trouver un candidat unique pour former une coalition formée du Rassemblement des forces démocratiques (RFD) d’Ahmed Ould Daddah et de l’Union nationale pour l’alternance démocratique (UNAD). Professeur d’histoire à l’Université de Nouakchott engrange les soutiens d’opposants qui avaient choisi de boycotter la présidentielle de 2014. Le président du Front national pour la démocratie et l’unité (FNDU) va tenter de jouer les rassembleurs dans une élection où il n’est pas présent pour la figuration.
Kane Hamidou Baba, le promoteur du «Vivre Ensemble»
Défenseur de la cause des populations négro-africaines, Kane Hamidou Baba trône à la tête d’un mouvement explicitement baptisé «Vivre Ensemble». Docteur en communication et leader du Président du Mouvement pour la Refondation (MPR), il entend ramener un équilibre dans la citoyenneté entre les Arabes et les populations négro-africaines. Il serait cependant réducteur de ramener sa candidature à celui de fédérateur de la minorité négro-africaine. Kane Hamidou Baba été pendant longtemps le conseiller à la Communication présidentielle de Maaouiya Ould Taya. Une charge qu’il abandonne lorsqu’il passe à l’opposition au sein de Rassemblement des forces démocratiques (RFD), il assure la vice-présidence du plus grand parti d’opposition de l’époque. Élu député sous ses couleurs, il passera peu de s’asseoir au perchoir de l’Assemblée nationale dont il deviendra le vice-président.
Mohamed Lemine El Wavi, le technocrate qui rêve du fauteuil
Le défi est immense pour Mohamed Lemine El Wavi. Sorti des bancs de l’Ecole nationale du journalisme et de la magistrature, cet expert-comptable formé en Tunisie peut se prévaloir de son passage au ministère des Finances. Un poste technique qui lui donne la caution de technocrate et pas seulement. A l’heure où la Mauritanie réfléchit sur les opportunités de son immense manne pétro-gazière, Mohamed Lemine El Wavi peut faire valoir son poste d’ex-directeur financier dans une société pour la distribution des produits pétroliers. L’homme incarne le candidat anti-système. Sûr de lui, il espère s’asseoir sur le fauteuil que Mohamed Ould Abdelaziz va laisser vacant.
Source : afrique.latribune