C’est un mauvais conte de Noël qui s’est joué ces derniers jours à La Rochelle. Ousmane Touré, Guinéen de 23 ans sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) mais travaillant depuis plusieurs années, a été expulsé vers son pays d’origine le 24 décembre. Deux jours plus tôt, il ne s’était pas rendu comme d’habitude à son travail, au restaurant Ginger de la capitale de la Charente-Maritime. Et pour cause, Sud Ouest raconte que lors de son pointage trihebdomadaire au commissariat de police, il n’a pas pu repartir. « Un policier est venu me dire : »il faut vous mettre en centre de rétention » et, il m’a enlevé mon téléphone », raconte Ousmane Touré à France 3 Nouvelle-Aquitaine.
Les choses n’ont pas traîné : après une nuit en centre de rétention, il est envoyé à Bordeaux pour être placé dans un avion direction Conakry, la capitale de la Guinée d’où il est parti en 2015. A l’époque âgé de 15 ans, il quitte son pays alors que ses deux parents sont morts « probablement d’Ebola », explique à nos confrères de la presse locale Didier Meyerfeld, de l’association Solidarité Migrants. Ce n’est qu’en 2019 qu’il atteint la France et qu’il fait une demande d’asile, dont il est débouté fin 2020. Sauf qu’entre-temps, Ousmane Touré a commencé à travailler dans des restaurants rochelais. Il est recommandé à Carlos Foito, le patron du Ginger.
« Rigoureux, irréprochable, adoré partout où il passait »
Le restaurateur était très proche de son employé, visiblement modèle : « Rigoureux, irréprochable, adoré partout où il passait. (…) Il m’appelait papa, je l’appelais fils », raconte-t-il à France 3 Nouvelle-Aquitaine. Une seconde OQTF qui planait au-dessus de sa tête depuis l’automne, Ousmane Touré pouvait espérer une régularisation par le travail. Actuellement régit par la circulaire Valls de 2012, ces conditions sont opaques, globalement à la discrétion des préfets. Il n’est pas rare que des élus locaux ou des parlementaires – de tous bords – poussent des dossiers en préfecture pour s’assurer d’une issue positive.
Tous les recours contre la seconde OQTF n’étaient pas épuisés quand Ousmane Touré a été expulsé le week-end dernier. « Les délais sont énormes, remarque Didier Meyerfeld. Pour le tribunal administratif de Poitiers, il y a entre dix et douze mois d’attente. Ousmane a été expulsé au bout de deux mois. »
La préfecture, dirigée par l’ancien chef de cabinet d’Emmanuel Macron jusqu’à l’été 2023, Brice Blondel, est pointée du doigt. Après avoir réagi sèchement aux sollicitations des médias locaux (« son éloignement est (…) la conséquence de l’application stricte du droit du séjour », comme le rapporte France 3 Nouvelle-Aquitaine), elle semble infléchir sa position. Les services de l’Etat dans le département se disent désormais « sensibles » à la situation d’Ousmane Touré. Il faut dire que sa situation a suscité beaucoup d’émotion à La Rochelle, jusqu’au soutien du Maire, Jean-François Fountaine (divers gauche). D’après Sud Ouest, une procédure est en cours pour le retour du Guinéen, l’affaire est dans les mains de l’ambassade de France à Conakry.
Par 20minutes.fr