C’est un chiffre qui donne de tournure à l’opinion guinéenne. Dans sa session de ce mardi 26 décembre, le conseil national de la transition qui joue le rôle du parlement a révélé dans ses débats sur la facette recettes avant l’adoption du projet de loi de finances initiale 2024, la somme astronomique que le pays perd dans ses exonérations fiscales aux sociétés minières. Le trou financier lié aux cadeaux fiscaux s’élève à 8000 milliards de franc guinéen soit plus de 8 milliards d’euros.
Pour illustrer ce manquement exorbitant, les conseillers nationaux ont dépeint dans un rapport, les noms des compagnies minières dans lesquelles les exonérations fiscales surréalistes sont enregistrées.
Voici les entreprises extractives qui en bénéficient :
D’abord la société aurifère de Guinée, connue sous le nom de Ashanti Gold of Guinea (SAG), celle-ci bénéficie d’un congé fiscal de 2020 jusqu’à 2025 et est exonérée des impôts et taxes suivants : La Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les sociétés (IS), les Droits d’Enregistrement (DE), la Patente, la Retenue sur loyers et la Taxe d’Apprentissage (TA). Cela plonge le pays avec un gap financier estimé à 332 ,56 Mds GNF par an.
Ensuite Guinea Alumina Corporation (GAC) détenue par les Émirats arabe unis, est exonérée des impôts et taxes suivants : la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les sociétés (BIC). Soit un manque à gagner estimé à 19, 66 Mds FG par an.
La SPIC est exonérée des impôts et taxes suivants : la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les sociétés (IS), CFU, IRVM, la Patente, la Taxe d’Apprentissage (TA). Soit un manque-à-gagner estimé à 94, 55 Mds GNF par an.
La SOCIETE MINIERE DE MANDIANA est exonérée des impôts et taxes suivants : la taxe sur la valeur (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les sociétés (IS) et la Taxe d’Apprentissage (TA). Soit un manque-à-gagner estimé à 93 ,93 Mds GNF par an.
La société minière de Boké (SMB) qui exploite la bauxite et détenue par les chinois est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Soit un manque-à-gagner estimé à 790 ,61 Mds GNF par an.
WINNING CONSORSIUM RAILWAY GUINEA SAU est exonérée des impôts et Taxes suivants : la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), l’Impôt sur les sociétés (IS) congé fiscal de 25 ans, la Patente, la Taxe d’Apprentissage (TA). Le manque-à-gagner par an est estimé à 238 ,73 Mds GNF.
La société GOLD MINING de KOUROUSSA est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Le manque-à-gagner par an est estimé à 94,014 Mds GNF.
La Société Minière de Dinguiraye (SMD), détenue par les russes est exonérée de la TVA, Retenue sur Loyers, la Taxe d’Apprentissage (TA). À ce niveau le manque-à-gagner par an est estimé à 156 ,96 Mds GNF.
Selon ces conseillers, « Il ressort de ces 8 exemples seulement, un manque-à-gagner par an de 1915,6 Mds de GNF sur les recettes minières, au compte de la Direction Générale des Impôts. Quant à la Direction Générale des Douanes, le manque à gagner par an est estimé à 6 064,41 Mds GNF dont 536,38 Mds au titre du régime dérogatoire du code minier ; 1 610,26 Mds au titre des conventions particulières ; 3 905,50 Mds au titre des protocoles, accords et conventions et 12,27 Mds au titre des exonérations exceptionnelles et conditionnelles », révèle le rapport.
« Le montant total des manques à gagner (impôts et douanes) au titre des exonérations minières sur l’année 2023 se chiffrerait à près de 8 000 Mds soit 29,72% des recettes fiscales y compris BAS dans le projet PLF 2024. Sans ces exonérations, les recettes fiscales y compris BAS seraient de 34 920,98 Mds au lieu de 26 920,98 Mds et la pression fiscale serait de 17,19% au lieu de 13,25% prévu dans ce projet de loi de finances. Ces manques à gagner dus au passif des régimes précédents auraient pu permettre à l’État de construire par an au moins, 300 km de routes bitumées, 1000 salles de classes, 500 centres de santé équipés. Au-delà de cette illustration, ce manque à gagner sur les recettes minières aurait également permis de faire face aux conséquences de certaines catastrophes comme celle survenue au dépôt d’hydrocarbures de Kaloum. Il est à préciser que ces exonérations abusives n’émanent pas du régime actuel. Elles sont le fait du lourd passif minier des régimes précédents. Par ailleurs, grâce aux réformes des nouvelles autorités, les recettes minières sont passés de 3142, 22 Mds en 2020 à 4 272 Mds en 2022 soit une hausse de plus de 1000 Mds (35,95%). À la lumière de ce qui précède et nonobstant l’Ordonnance O/2021/001/PRG/CNRD/SGG du 16 septembre 2021, portant prorogation des Lois Nationales, des Conventions, Traités et Accords Internationaux en vigueur à la date du 05 septembre 2021, le CNT attire l’attention du Chef de l’État sur la nécessité de la révision de ces conventions qui sont défavorables au développement du pays, et compromettantes pour l’avenir des futures générations. Il le rassure de son soutien total dans cette démarche », ont adressé les conseillers nationaux.
Pour combler cette perte rocambolesque, qui plonge le pays dans une paupérisation totale, ils proposent la révision des conventions en urgence pour vue qu’on arrête de saigner financièrement l’État. Reste à savoir si ce régime militaire pourrait opérer cette révolution fiscale.
Afriquevision.info