La conférence de l’ONU sur le climat a pris fin ce mercredi 13 décembre à Dubaï aux Émirats arabe unis avec près de 80 mille participants venus de tous les pays membres de la convention cadre des nations unies sur les changements climatiques. Le sommet a connu son épilogue en adoptant un texte non contraignant pour les États.
Après deux semaines de négociations, les près de 200 pays présents à la COP 28 de Dubaï ont trouvé un accord. Adopté à l’unanimité, il mentionne pour la première fois l’objectif d’une sortie des énergies fossiles.
Il aura fallu prolonger les négociations pendant une nuit entière pour parvenir à un accord satisfaisant, mais c’est chose faite. En début de matinée ce 13 décembre, les près de 200 pays qui prenaient part à cette 28ème conférence mondiale sur le climat ont tous donné leur accord sur un texte « historique pour accélérer l’action climatique », a salué le président de la COP 28 Sultan Al Jaber.
Historique, cet accord l’est assurément, puisqu’il mentionne pour la première fois le principe d’une sortie de toutes les énergies fossiles, dont la combustion est le principal responsable du réchauffement climatique. Selon Carbone 4, en 2021, l’utilisation des énergies fossiles a en effet généré 75 % de l’ensemble des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Un jeu d’équilibriste sur la sortie des énergies fossiles
Le texte de l’accord conclu ce mercredi indique ainsi la volonté des pays de « transitionner hors des énergies fossiles dans les systèmes énergétiques, d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action dans cette décennie cruciale, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050 conformément aux préconisations scientifiques ». Une bien longue phrase, dans laquelle chaque mot a été pesé pour s’assurer que tous les pays présents à la COP valideraient l’accord, qui doit être voté à l’unanimité pour pouvoir être adopté.
D’abord, la notion de transition (en anglais « transitioning away » dans les termes de l’accord) est le fruit d’un premier compromis entre les pays les plus ambitieux et les plus frileux. D’un côté, les petits États insulaires et l’Union européenne en tête souhaitaient que le texte mentionne une sortie pure et simple des énergies fossiles (« phase out » en anglais), mais d’un autre côté les pays producteurs de pétrole – principalement l’Arabie saoudite – restent accrochés à leur modèle économique dépendant des fossiles.
Sans objectif chiffré, ni précision de date de sortie définitive du pétrole, l’accord permet ainsi de contenter les pays du golfe. Pour s’assurer du soutien des plus ambitieux, le texte réaffirme tout de même l’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Sur la demande explicite de l’Union européenne, il souligne également l’urgence d’entamer une sortie des fossiles « dans cette décennie cruciale », alors que le pic mondial des émissions de gaz à effet de serre liées à ces énergies n’a pas encore été atteint.
Le gaz, considéré comme une énergie « de transition », épargné de l’accord
Le second point clé de cet accord donne des gages aux pays en développement, où près de 800 millions de personnes manquent d’accès à l’électricité. Le texte précise ainsi que la transition vers la fin des énergies fossiles devra se faire « d’une manière juste, ordonnée et équitable », impliquant donc un rythme de sortie différent selon les pays.
Dans ce même objectif, dès le premier jour de la COP 28, la création du fonds « pertes et dommages » a acté l’indemnisation des pays en développement, en première ligne face au réchauffement climatique. Ce fonds sera abondé par les pays du Nord, historiquement émetteurs de gaz à effet de serre, mais sans obligation de montant.
L’accord reconnaît par ailleurs que « les carburants de transition peuvent jouer un rôle en facilitant la transition énergétique tout en assurant la sécurité énergétique ». Une phrase un peu énigmatique, mais qui signifie en réalité l’autorisation d’une utilisation prolongée du gaz, considéré dans ce texte comme une énergie « de transition » et non comme une énergie fossile. Ce point de l’accord vise directement à contenter les principaux producteurs de gaz, Russie et Etats-Unis en tête. C’est l’une des zones d’ombres du bilan de la COP 28, qui ne marque ainsi pas une fin totale de l’exploitation des fossiles.
Triplement des énergies renouvelables et consécration du nucléaire
Exclusivement centré sur la question des énergies, l’accord de la COP 28 inscrit également un objectif de triplement de la production d’énergies renouvelables d’ici 2030. En moins de dix ans, les capacités mondiales devront ainsi passer de 3 400 à 11 000 gigawatts. Dans le même temps, les États se sont également engagés à doubler leurs efforts en matière d’efficacité énergétique, un terme qui désigne le rapport entre la quantité d’énergie produite et l’énergie consommée.
En parallèle, l’accord parie aussi sur les innovations technologiques pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Le texte prévoit ainsi une « accélération des technologies à émissions nulles ou faibles », parmi lesquelles « l’hydrogène bas carbone », mais aussi « le captage et le stockage [de carbone] ». Ce dernier dispositif, qui consiste à limiter les émissions en les piégeant et les stockant dans le sous-sol, est particulièrement défendu par les pays producteurs de pétrole pour pouvoir continuer d’exploiter les hydrocarbures tout en compensant leurs émissions. Il reste un outil controversé, encore peu utilisé car coûteux, en raison d’une forte consommation d’eau et d’énergie.
Enfin, le texte mentionne explicitement l’énergie nucléaire, qui avait déjà fait l’objet d’un accord le 2 décembre entre une vingtaine de pays (dont la France, les Etats-Unis et les Émirats), appelant à tripler les capacités de l’énergie nucléaire dans le monde d’ici 2050. Emmanuel Macron et Agnès Pannier-Runacher se sont réjoui de cette reconnaissance officielle de l’importance du déploiement du nucléaire dans l’accord final. « Le projet d’accord est donc pleinement cohérent avec la stratégie française et la future programmation pluriannuelle de l’énergie », a affirmé depuis Dubaï la ministre de la Transition énergétique.
Afriquevision avec Public Sénat