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Changement climatique : pourquoi la problématique est mal perçu ?

Les changements climatiques sont perceptibles depuis plusieurs années, mais la compréhension de cette problématique par l’opinion publique est de plus en plus compliquée. Malgré le travail intense des scientifiques, enseignants, chercheurs et militants écologistes dans l’alerte et la vulgarisation des facteurs destructifs de la planète, la question divise toujours les populations. Mais pourquoi autant de gens n’arrivent pas à s’imprégner de la gravité de ce fléau ?

Plusieurs facteurs pourraient expliquer cette réalité sociétale. D’abord, le concept changement climatique est vu par de nombreux citoyens comme à la fois un domaine technique avec un jargon scientifique. Et de facto, certains qui ne s’y retrouvent pas dans le cercle environnementaliste ou des branches similaires estiment n’avoir rien à apprendre du phénomène.

La non-utilisation des termes simples et facile à appréhender constitue également l’une des causes de la méconnaissance de la notion du climat. La question ne fait pas aussi l’objet de débats dans les grandes émissions radio et télévisions de manière régulière, même si en France certains médias se sont engagés récemment à en faire un sujet central dans leurs rédactions.

Dans les pays moyens avancés (PMA), où les conséquences sont désastreuses, les dérèglements climatiques ne sont presque abordés que par les ONG spécialisées dans la protection de l’environnement ainsi que certains médias qui disposent des émissions dans leurs grilles de programmes. En Guinée, par exemple, ou dans la plupart des pays du monde, le climat n’est pas inscrit dans les différents programmes d’éducation nationale et supérieur. Le réchauffement climatique n’étant pas enseigné dans tous les cursus scolaires, cela constitue un frein pour sa dissémination. Autant d’obstacles qui compliquent la meilleure compréhension des enjeux liés aux changements climatiques.

Selon Sylvestre HUET, journaliste spécialisé sur le Climat « Des milliards de personnes ignoraient et continuent d’ignorer les causes, conséquences et les moyens de parer aux menaces et d’en limiter l’ampleur des changements climatiques ».

Dans le même sillage, il s’interroge. « Pourquoi ? Parce que les connaissances ou savoirs scientifiques et techniques sont difficiles à partager ou à être compris par les populations, même dans les pays industrialisés comme en France ou encore aux États-Unis, où le niveau de scolarité est beaucoup plus élevé que dans les pays sous-développés ».

Dans ces pays développés, une grande partie des citoyens alimentent le débat, en qualifiant les émissions de gaz à effet de serre dans le réchauffement climatique comme une simple hypothèse. Ils sont entre 34% à 45% en 2010 à professer cette trompeuse opinion, précise-t-il.
Pour Annamaria Lammel, maître de conférences à l’Université Paris VIII, anthropologue, chercheuse en psychologie cognitive, et experte au GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat), qui a été interrogée en 2015 par le site Science et Avenir, elle analyse le niveau de connaissances des individus sur les changements climatiques. Dans ses réponses aux questions de la plateforme spécialisée en science de la nature, l’universitaire indique que dans son travail d’exploration de la « perception de l’incertitude, l’importance de l’environnement de proximité ainsi que la création de valeurs écologique », elle utilise des entretiens individuels pour mesurer l’impression des personnes sur le sujet climatique.

L’experte mentionne que la difficulté liée à la compréhension de la problématique du climat varie d’une ville à une autre en France. « Lorsqu’on demande à des habitants de Paris qui vivent avec une température moyenne annuelle de 7,1°C, ce que c’est que le climat, leurs réponses se focalisent sur des notions de chaud et de froid ou encore de la météo. Si on pose la même question aux Marseillais, où il fait 9,4°C en moyenne sur l’année, par rapport à un Guyanais, qui vit dans un climat où la température moyenne de 27°C, la réponse est que la variation climatique est peu sensible tout au long de l’année. ». « L’objectif est difficile à se représenter, quand on subit tous les ans, le retour du froid hivernal.», explique Lammel.

Dans une étude réalisée en 2016, par l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME), intitulée ‘’représentations sociales de l’effet de serre et du changement climatique’’ 26% des citoyens français interrogés estiment que, les problèmes environnementaux les plus préoccupants sont « l’effet de serre et le réchauffement climatique », mais en 2015, ils étaient 33% à placer le sujet comme préoccupation centrale.

C’est une chute de 7% par rapport à l’année précédente. Mais les auteurs de l’enquête précisent que cette variation de pourcentage est liée aux effets de la COP21, le Grenelle de l’Environnement a été organisé en 2007 par (Sarkozy et Borloo) qui s’est tenue à Paris en 2015 et qui a été largement couverte dans les médias. La conclusion positive de cette COP a sans doute provoqué un regain d’optimisme et en définitive exercé un effet démobilisateur. Le rapport indique que les « années de fortes mobilisations politiques et médiatiques offrent un contexte favorable à une large sensibilisation du public sur les questions de changements climatiques ». Les perturbations du cycle des saisons contribuent également du niveau de perception de certains profanes et climatosceptiques sur les phénomènes des changements climatiques ou encore de l’effet de serre.

Les inondations, la fonte de glaces, la sécheresse, la montée du niveau marins, la pollution, la canicule, l’ensablement des lits de cours d’eau, les tempêtes constituent des facteurs de compréhension du réchauffement climatiques des jeunes ayant fait des études supérieurs ou scientifiques et une grande partie des personnes âgées de 65 à 80 ans. L’enquête révèle que les 42% des convaincus, estiment que le « réchauffement climatique est une certitude pour la plupart des scientifiques ou encore que le réchauffement de la planète est causé par les activités humaines. »

En revanche, les 13% des sceptiques, reprochent aux scientifiques qui étudient les évolutions du climat d’avoir exagéré les risques du réchauffement climatique. Ils qualifient également « les désordres du climat tels que les tempêtes ou les inondations en France comme étant des phénomènes naturels comme il y en a toujours eu. » Et 45% des hésitants ont quant à eux donnés des réponses mixtes. L’âges des sondés varient entre 15 et plus de 70 ans.

Pour conclure, on constate que dans cette enquête, les premiers à être persuadés de l’effet de serre et du changement climatique sont des universitaires et scientifiques et qu’ensuite vient la catégorie des personnes ayant un niveau d’études de Bac+2 au moins. C’est-à-dire combien la question ne pourra être complètement appréhendée par la population générale sans une augmentation significative du taux de scolarité dans les différents pays.

 

Mamadou DIALLO

Journaliste spécialisé sur les questions climatiques