Le gouvernement socialiste espagnol a subi un nouveau coup dur mardi avec la démission de sa ministre de la Santé après des révélations sur une manipulation de ses notes pour obtenir un diplôme de master. Il s’agit de la deuxième démission fracassante au sein de l’exécutif de Pedro Sanchez, formé il y a moins de quatre mois.
Le ministre de la Culture, Maxim Huerta, n’était resté qu’une semaine en poste, rattrapé par des révélations sur des déboires passés avec le fisc. « J’ai communiqué au président du gouvernement ma démission », a elle-même annoncé mardi soir la benjamine du gouvernement, Carmen Monton, 42 ans, qui a jeté l’éponge alors même que Pedro Sanchez venait de déclarer qu’elle faisait « un travail extraordinaire et allait continuer à le faire ».
Carmen Monton a été mise dans l’embarras par des articles de presse sur la manipulation de ses notes dans le cadre d’un master en « études de genre » obtenu à l’Université Rey Juan Carlos.
Cet établissement public est au centre d’une énorme polémique depuis des mois, dans ce qui a été baptisé en Espagne le « mastergate ». Par ricochet, la démission de cette ministre de gauche pourrait mettre en difficulté le rival conservateur de M. Sanchez, le président du Parti populaire (PP) Pablo Casado (droite), qui a reconnu avoir obtenu de la même université un diplôme de master de droit des régions, sans même avoir passé d’examen ni avoir assisté aux cours.
Cinq juges de la Cour suprême doivent prochainement décider s’ils donnent suite à l’enquête d’une juge d’instruction qui avait estimé que M. Casado pourrait s’être rendu coupable de délits de corruption.
– Réseau organisé –
Pour le politologue espagnol Pablo Simon, la démission de Mme Monton peut nuire au gouvernement, qui est « en situation de minorité parlementaire ». Mais cela révèle surtout, selon lui, « l’existence d’un réseau organisé à l’intérieur de l’Institut de droit public (de l’université Rey Juan Carlos, ndlr), pour l’attribution de diplômes universitaires grâce à un traitement de faveur » envers des personnalités, afin de « créer un réseau d’influence ».
Le média d’investigation en ligne eldiario.es avait révélé qu’en juin 2011, le dossier universitaire de Mme Monton comportait la mention « non présenté » pour une des matières, soudainement remplacée en novembre par un « approuvé ». Elle a ensuite reçu le coup de grâce quand une chaîne de télévision, la Sexta, a fait état d’un possible plagiat dans son mémoire de fin de master.
L’université Rey Juan Carlos a reconnu dans un communiqué une manipulation des notes et indiqué qu’elle examinait le dossier de Mme Monton afin d’ »établir les responsabilités ». Mme Monton s’est défendue en assurant qu’elle avait été « transparente et honnête », n’avait « commis aucune irrégularité » et avait la « conscience tranquille ».
S’allonge ainsi la liste des personnalités politiques espagnoles soupçonnées d’avoir obtenu un titre universitaire grâce à un traitement de faveur. Car c’est également à l’université Rey Juan Carlos qu’une autre figure du PP, Cristina Cifuentes, avait obtenu un master de droit des régions dans des circonstances douteuses.
En avril, Mme Cifuentes avait finalement démissionné de la présidence de la région de Madrid, après avoir été affectée par une autre affaire mettant en cause sa probité. M. Casado a quant à lui maintes fois exclu de démissionner de la présidence du PP, et le parti a pris résolument sa défense.
AFP